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La maison aux mille pièces

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Une métaphore pour approcher la nature de l’esprit

Pour parler de la nature de l’esprit, de ce que nous sommes profondément, les enseignements bouddhistes utilisent souvent des images, des métaphores. Non pas pour expliquer intellectuellement, mais pour permettre une reconnaissance directe, sensible, vécue.

Je vous propose ici celle de la maison aux mille pièces.


Mille, parce que ce nombre évoque quelque chose de vaste, d’indéfini, presque sans limite — comme lorsque, enfants, mille francs semblaient déjà une somme infinie. C’est exactement cela que cette métaphore cherche à approcher.


Imaginons que l’esprit humain soit une immense maison ancienne, bâtie au fil des générations. Une maison avec des pièces connues et d’autres oubliées, des couloirs secrets, des étages où plus personne ne monte, un grenier chargé de mémoire, un sous-sol silencieux que nul n’a jamais vraiment exploré. Cette maison, c’est nous.

Et pourtant, dans notre vie quotidienne, c’est comme si nous n’habitions qu’une seule pièce de cette demeure immense.


La pièce habituelle : l’esprit ordinaire

La pièce dans laquelle nous vivons le plus souvent peut être comparée à l’esprit ordinaire. C’est un espace toujours ouvert sur l’extérieur, encombré d’objets, de souvenirs, d’images, de bruits. Les meubles y représentent nos habitudes, nos croyances, nos schémas répétitifs. La lumière y entre par des fenêtres qui la déforment parfois, et une lampe au plafond vacille au rythme de nos humeurs.


Cette pièce correspond au mental habituel : pensées, émotions, réactions automatiques. Nous la connaissons bien. Elle est notre zone familière, parfois même notre zone de confort. Et nous croyons souvent, sans même nous en rendre compte, que l’esprit se résume à cet espace-là.


Il y a quelque chose de très parlant dans cette image, jusque dans notre vécu concret : ce sentiment d’être enfermé dans son mental, parfois même enfermé physiquement dans une pièce, dans une forme d’inertie ou d’apathie, comme si la vie se retirait peu à peu.


Les autres pièces : mémoires, conditionnements, potentiels oubliés

Pourtant, cette maison est immense.

Il y a le grenier des mémoires familiales, chargé d’histoires anciennes. Il y a des débarras sombres, où se trouvent des blessures enfouies, que l’on évite par peur de ce qui pourrait s’y réveiller. Il y a des bibliothèques poussiéreuses de compétences oubliées, de ressources jamais réactivées. Des chambres closes d’émotions latentes. Des espaces d’intuition profonde, de créativité, de silence.


Parfois, un courant d’air traverse la pièce habituelle. Une odeur d’enfance, un son lointain, une impression diffuse. Quelque chose nous rappelle qu’il existe d’autres espaces en nous. Mais bien souvent, nous n’osons pas les explorer.


Toutes ces pièces représentent les multiples dimensions de l’esprit conditionné.

Il y a aussi le sous-sol silencieux, vaste, peu éclairé : l’inconscient profond, ālaya-vijñāna dans la tradition bouddhiste. On y trouve les traces des actions passées, les graines karmiques, les tendances héritées, les empreintes de nos vécus. Beaucoup de mouvements mentaux prennent racine là, même si nous les percevons comme surgissant dans la pièce du dessus.


L’escalier caché : la méditation

Dans cette demeure, il existe pourtant un passage discret : un vieil escalier, caché derrière une tenture.

Tirer cette tenture demande un geste simple — un instant de présence, un moment de conscience. Derrière, un escalier étroit apparaît. Il descend vers un autre niveau de l’être. Cet escalier, c’est la méditation.

Au début, il craque. On hésite. On descend quelques marches, puis on remonte, parfois effrayé. Et peu à peu, avec la pratique, avec la régularité, quelque chose s’apprivoise. On ose descendre davantage.


Le hall central : la nature non conditionnée de l’esprit

En descendant, l’escalier débouche sur un hall immense, presque nu. Le sol est lisse. La lumière est douce. Rien n’y est personnel. Rien n’y est chargé.

Ce hall n’est pas une pièce de plus. Il est l’espace même qui permet toutes les pièces. C’est la nature claire, vaste et ouverte de l’esprit.

Les murs y semblent transparents. Le temps s’y dilate. On y respire autrement.

Une grande baie vitrée s’ouvre sur un paysage infini. La lumière qui entre n’est pas extérieure : elle est inhérente à l’esprit lui-même, comme un soleil intérieur que la maison recouvre simplement de murs et d’étages.


Intégrer, plutôt que fuir

Lorsque l’on sait accéder à ce hall central, quelque chose change profondément. Les pièces du dessus — pensées, émotions, mémoires — ne disparaissent pas, mais elles cessent d’être des prisons. On peut traverser la colère, la tristesse, le passé, tout en gardant l’espace du hall vivant au cœur.

Il n’y a rien à rejeter. Les pièces ne sont pas l’ultime réalité, mais elles se manifestent dans un espace plus vaste qu’elles.


Avec le temps, les murs deviennent plus légers, plus poreux. On comprend que les pièces sont des constructions temporaires, qu’aucune n’est un « moi » fixe. La maison entière est faite du même espace fondamental.

Découvrir la nature de l’esprit, ce n’est pas s’enfuir dans le hall pour échapper aux pièces. C’est reconnaître que toute la maison est faite d’espace. Il n’y a pas de dualité entre la cuisine en désordre et le hall silencieux.


Habiter toute la maison

La vie spirituelle ne consiste pas à s’installer dans une pièce particulière. Elle consiste à apprendre à circuler librement dans la maison que nous sommes, en sachant toujours revenir à cet espace central, jamais né, jamais détruit.

La nature de l’esprit n’est pas une pièce nouvelle à construire.

C’est la maison entière qui se reconnaît comme espace.


Une méditation guidée pour faire l’expérience

Pour prolonger cette exploration, je vous propose une méditation guidée inspirée directement de cette métaphore de la maison aux mille pièces.


Une invitation à parcourir intérieurement la maison que vous êtes : entrer dans la pièce familière du mental, sentir les autres espaces, découvrir l’escalier caché, et reconnaître ce hall central de clarté et de présence qui est toujours là, même lorsque nous ne le percevons pas.


Cette méditation ne cherche rien à créer, ni à atteindre.Elle invite simplement à reconnaître, dans l’expérience directe, que tout est déjà là.


Vous pouvez écouter la méditation guidée ci-dessous et vous laisser accompagner dans ce voyage intérieur.


Bonne pratique.


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